La communauté universitaire a appris avec regret, le 28 septembre dernier, le décès à l’âge de 82 ans, d’André Delorme, professeur titulaire à la retraite au Département de psychologie. Depuis 1963, il avait occupé au Département les fonctions de professeur-chercheur dans le domaine de la psychologie de la perception, en y assumant l’enseignement et la direction de nombreuses recherches expérimentales. Au plan administratif, il y avait aussi assumé d’une façon intérimaire les fonctions de directeur.
Ses recherches, particulièrement prolifiques, ont porté tant sur les nourrissons et les jeunes enfants que sur les adultes et les personnes âgées. Il s’est intéressé entre autres à la stéréoscopie chez le nourrisson, au contrôle visuel de la posture chez le nourrisson et la personne âgée, au vertige des hauteurs chez le jeune enfant et l’adulte, et à la perception du mouvement de soi dans des conditions de simulation de vol.
Tout récemment, son fils Sébastien a résumé ainsi l’apport créatif et la passion de son père pour la recherche en psychologie de la perception : « Ses études graduées lui ont donné goût à la recherche scientifique. Au cours de ses 38 ans de carrière comme professeur, son enseignement et ses travaux de recherche se concentrent sur la perception visuelle. Il s’intéresse entre autres à la perception des couleurs et des formes, aux illusions d’optique comme les effets consécutifs, à la perception de la profondeur et des distances, à la perception de la vitesse, au contrôle visuel de la posture, à la perception de mouvement de soi, etc. Pour mieux comprendre le rôle du cerveau dans la perception, il s’intéresse à des cas limites, comme les illusions visuelles chez les déficients mentaux, la perception chez les nourrissons, les jeunes enfants, et les personnes âgées, la perception chez les autistes ayant des capacités exceptionnelles en dessin, l’absence de vertige chez certains autochtones, ou l’évolution historique de la représentation de la 3e dimension dans l’art. Dans les années 1980, pour étudier l’illusion de mouvement de soi, il construit dans son laboratoire une chambre mobile dans laquelle il mesure les oscillations posturales des sujets humains qui se tiennent debout lorsque la chambre fait un mouvement de va-et-vient, à l’aide d’une plateforme de force branchée sur un ordinateur Apple II. Ses travaux intéressent la division aviation de la multinationale montréalaise CAE (Canadian Aviation Electronics), qui cherche des moyens visuels d’augmenter l’illusion de mouvement de soi à bord de ses simulateurs d’avions civils et militaires. Il réalise également des expériences sur le vertige sur le toit du pavillon principal de l’Université de Montréal à près de 8 étages de hauteur. Tout au long de sa carrière, il nous amuse avec son regard humoristique sur l’évolution de la science psychologique, avec des réflexions comme par exemple “la psychologie est une science biodégradable”, signifiant que la biologie explique maintenant des phénomènes que la psychologie expliquait autrefois."
André Delorme a publié, entre autres, « La psychologie de la perception », ouvrage paru aux Éditions Études Vivantes en 1982 (et maintenant épuisé), de même qu’un chapitre qui sera abondamment cité par les spécialistes du domaine et qui est intitulé «Mécanismes généraux de la perception », dans le classique « Traité de psychologie expérimentale », publié en 1994 aux Presses Universitaires de France sous la direction de Marc Richelle, Jean Requin et Michèle Robert. Plus récemment, alors qu’il était à la retraite, il a co-édité en 2003 chez Gaétan Morin Editeur, en collaboration avec le professeur Michelangelo Fluckiger, de l’Université de Genève, « Perception et réalité », livre qui explore le fonctionnement des perceptions et montre comment les concepts théoriques s’articulent avec les preuves expérimentales. Ce livre a également été publié en Europe par les prestigieuses Editions de Boeck, dans leur collection Neurosciences & Cognition.