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Goûts et préférences des Québécois en matière de sexualité : une étude déboulonne les ...

 

 

Les Québécois ont-ils des comportements et des goûts sexuels anormaux? Selon la 5e édition du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-5), les goûts sexuels sont groupés en deux catégories, soit normaux (normophiliques) et anormaux (paraphiliques).

 

Cependant, des résultats publiés récemment dans The Journal of Sex Research contredisent le DSM-5 en démontrant que plusieurs goûts et comportements sexuels légaux, mais considérés comme anormaux en psychiatrie, sont plutôt fréquents dans la population. Cette recherche a été menée auprès de 1040 Québécois et Québécoises par Christian Joyal et Julie Carpentier, chercheurs à l'Institut Philippe-Pinel de Montréal et à l'Institut universitaire en santé mentale de Montréal (CIUSSS de l'Est-de-l'Île-de-Montréal), centres affiliés à l'Université de Montréal.

 

«L'objectif principal de cette étude était de déterminer la norme dans les désirs et les expériences sexuels auprès d'un échantillon représentatif de la population», explique Christian Joyal, également professeur titulaire au Département de psychologie de l'Université du Québec à Trois-Rivières. Les chercheurs ont fait appel à une firme de sondage professionnelle pour interroger des hommes et des femmes à propos de leurs expériences sexuelles et de leurs désirs d'avoir des comportements sexuels considérés comme anormaux par le DSM-5.

Le sondage, réalisé par téléphone et Internet, a permis aux chercheurs de confirmer leur hypothèse de base. «Dans l'ensemble, près de la moitié (45,6 %) de l'échantillon aimerait avoir au moins un comportement sexuel considéré comme anormal, tandis que le tiers (33 %) a déjà expérimenté au moins une fois ce genre de pratique. Ces faits indiquent que, avant d'étiqueter comme anormal un goût sexuel légal, il convient de connaître les normes de pratiques sexuelles. Certains goûts paraphiliques sont plus communs qu'on pourrait le croire, en termes non seulement de fantasmes, mais aussi de désirs et de comportements», mentionne M. Joyal.

Concrètement, sur les huit exemples de comportements paraphiliques énumérés dans le DSM-5, quatre (voyeurisme : 35 %, fétichisme : 26 %, frotteurisme : 26 % et masochisme : 19 %) ne sont ni rares ni inhabituels quant aux expériences et aux souhaits rapportés par les hommes et les femmes. En outre, les chercheurs ont trouvé un lien statistiquement significatif entre un goût pour la soumission sexuelle et celui pour d'autres activités sexuelles, suggérant que le désir de pratiquer le masochisme est significativement associé à des goûts sexuels plus diversifiés.

«Il est vrai que les hommes, en général, sont plus intéressés que les femmes par des comportements sexuels paraphiliques. Néanmoins, cela ne signifie pas que les femmes n'ont pas d'intérêt pour de tels comportements. En fait, les femmes qui rapportent un intérêt pour la soumission sexuelle ont des goûts sexuels plus variés et disent avoir une meilleure satisfaction vis-à-vis de leur vie sexuelle. Il ne s'agirait donc pas d'un goût anormal», signale M. Joyal.

Le chercheur tient à préciser qu'une distinction doit être faite entre les comportements sexuels paraphiliques, les paraphilies et les troubles paraphiliques. «On parle de trouble paraphilique lorsque l'acte sexuel implique des partenaires non consentants ou qu'il engendre une souffrance ou un désarroi chez la personne qui l'accomplit. Il peut également être absolument nécessaire pour obtenir une satisfaction. Une paraphilie ne renvoie pas à un trouble mental, mais plutôt à un goût pour un comportement non normophilique, alors que les comportements paraphiliques ne sont pas préférentiels, mais occasionnels. Tout de même, cette étude montre clairement que les comportements paraphiliques légaux sont loin d'être anormaux, contrairement à ce qui est avancé par le DSM-5. Il nous est même permis de penser que les résultats de cette étude sur les fantasmes des Québécois sont aussi représentatifs de ceux des populations d'Amérique du Nord et d'Europe», conclut M. Joyal.

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