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Stéphane Gagnon

Psychologue

La réalité virtuelle au service de la santé mentale

Diplômé de la maîtrise en psychologie (1997)

Psychologue, détenteur d’une maîtrise en psychologie de la Faculté des arts et des sciences de l’Université de Montréal, Stéphane Gagnon a fait toute sa carrière dans le public, tantôt comme clinicien, tantôt comme conseiller cadre. Depuis quelques années, il collabore au projet de recherche clinique de thérapie par avatar, une approche émergente pour le traitement des hallucinations auditives. Entre autres.

Dans une petite salle de l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal (IUSMM), au sein duquel travaille Stéphane Gagnon, des ordinateurs trônent devant une grande vitre. De l’autre côté, des fauteuils bien confortables et des casques de réalité virtuelle. Un patient vient consulter parce qu’il entend deux voix discordantes : le bon dieu, qu’il aime et qu’il ne veut pas perdre. Et le diable, un fatigant qu’il souhaite éliminer.

« La séance commence normalement, explique M. Gagnon. On discute, on voit comment s’est passée la semaine, si les stratégies dont nous avons parlées ont pu être mises en place, et ce qui en a résulté. Et puis, le patient s’installe dans le fauteuil. Il met son casque de réalité virtuelle, grâce auquel la voix qu’il entend va être incarnée sous la forme d’un avatar. C’est au psychologue, en l’occurrence moi, d’incarner la psychologie du personnage à qui le patient attribue sa voix. »

Des résultats fort prometteurs

Ici, Stéphane Gagnon incarne ainsi le diable qui insulte son patient, le traitant de « crotté ».

« Dans une thérapie par avatar, le patient matérialise la voix qu’il entend, Au lieu d’être dans l’évitement, ce qui n’est jamais très efficace sur le long terme, il est dans l’acceptation que les voix sont là, mais aussi dans une affirmation de soi, explique Stéphane Gagnon. Depuis la mise en place de ce programme, nous avons vu plus de 75 patients présentant de lourds troubles psychotiques et à chaque fois ou presque, il y a une véritable activation émotionnelle ainsi qu’une modification de la relation qu’ils entretiennent avec les voix qui se créent. Les résultats sont impressionnants. »

Assez pour que ce programme de thérapie par avatar, développé par deux chercheurs de l’Université de Montréal, les Dr Alexandre Dumais et Stéphane Potvin, tous deux affiliés au Département de psychiatrie et d'addictologie, s’élargissent déjà à des patients en prise avec la consommation de cannabis.

« Les applications potentielles sont grandes, notamment chez les patients qui sont réfractaires aux autres orientations thérapeutiques, pharmacologiques par exemple », ajoute M. Gagnon, qui espère bien qu’un jour, quiconque pourra prendre rendez-vous dans une clinique proposant ce type de thérapie.

De ses deux années de maîtrise à l’Université de Montréal, Stéphane Gagnon se souvient d’avoir été impressionné par la grande ville qu’était Montréal pour ce Saguenéen d’origine, et par la qualité et la notoriété des professeurs. Son diplôme en poche, il travaille durant six ans pour un organisme communautaire offrant un programme de réinsertion sociale pour une clientèle en provenance des pénitenciers fédéraux. En 2003, il intègre l’Hôpital Louis-Hyppolite Lafontaine et commence par travailler avec des patients en proie avec des troubles psychotiques sévères. En 2011, il devient conseiller cadre. Il mène divers projets de restructurations et mises en place de pratiques de pointe, alors que l’hôpital cherche à devenir un institut universitaire – qualification obtenue en octobre 2014, il devient alors l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal (IUSMM) – et que la Loi 10 voulue par le ministre libéral Gaétan Barrette, force une restructuration totale du secteur de santé.

« Ce travail de réorganisation, ce n’était vraiment pas ma passion, avoue-t-il. Je n’avais jamais complétement quitté la clinique car je participais à divers projets, mais à ce moment-là, j’ai trouvé qu’il était temps pour moi de retourner plus intensément auprès des patients. »

Pour une meilleure prise en charge de la santé mentale

Il passe alors deux ans dans les unités de réadaptation intensive, puis intègre, le 1er août dernier, les services des troubles anxieux et de l’humeur, en plus de développer la thérapie par avatar sur le plan clinique. Quand il regarde aujourd’hui en arrière, il constate que son métier a bien changé durant ses presque vingt-cinq ans de pratique. Et que la façon dont sa profession est perçue par la communauté est très différente également.

« C’est très positif, estime-t-il. L’idéal maintenant, et certains le font déjà, ce serait de consulter de manière préventive. Pour prendre la température de son état émotionnel. Il ne faudrait pas attendre que le corps ne soit plus capable de se lever pour tirer la sonnette d’alarme. »

Pour cela, Stéphane Gagnon plaide pour une meilleure prise en charge de la santé mentale au niveau gouvernemental. Ainsi que pour une revalorisation du métier dans le secteur public, alors même que les postes ont du mal être comblés.

« Nous avons des praticiens qui sortent avec un doctorat de troisième cycle, puisque c’est ce qui est exigé aujourd’hui, explique-t-il. C’est certain que ce qu’on leur propose, au niveau salarial notamment, n’est vraiment pas attirant. C’est dommage car les jeunes qui arrivent sur le marché du travail bénéficient de très bonnes formations et que la demande, surtout depuis le début de la pandémie, est en croissance constante. »

Ce portrait a été rédigé par le Réseau des diplômés et des donateurs de l’Université de Montréal dans le cadre de la Journée mondiale de la santé mentale – octobre 2021.